Une crise complexe
Depuis plusieurs années, Haïti est plongé dans une crise socio-économique, politique et humanitaire qui a atteint des niveaux critiques depuis la mi-septembre 2022 en raison de l'escalade de la violence armée et du contrôle du territoire par les gangs. L'insécurité généralisée et l'instabilité politique ont considérablement affecté l'accès du pays aux biens et services essentiels, tels que la nourriture, l'eau, l'assainissement et les soins de santé, et ont forcé des centaines de milliers de personnes à fuir leur foyer.
Entre-temps, une épidémie de choléra est réapparue en octobre 2022, après trois ans sans cas, et s'est propagée rapidement dans tout le pays. Bien que l'épidémie de choléra semble sous contrôle, les conditions restent réunies pour un risque accru de propagation de la maladie, ainsi que d'autres maladies telles que la dengue, la tuberculose, la rougeole et la polio, notamment dans les sites de populations déplacées à l'intérieur du pays (PDI).
Situation actuelle & Impact sur la santé
Depuis le 11 novembre 2024, la situation humanitaire en Haïti s'est aggravée en raison de la recrudescence de la violence liée aux activités des gangs à Port-au-Prince et dans les régions avoisinantes.
La population haïtienne est confrontée à un manque d'accès aux services médicaux sans précédent, en particulier dans la région métropolitaine de Port-au-Prince (PaP), où moins de la moitié des établissements de santé fonctionnent à leur capacité normale, ce qui exerce une pression énorme sur les systèmes de santé locaux. Les difficultés d'accès aux services affectent les patients souffrant de maladies chroniques et les femmes enceintes, entraînant une augmentation des urgences médicales et obstétriques.
Points saillants
A compter du 11 novembre 2024
La situation sécuritaire reste volatile et imprévisible à Port-au-Prince, continuant d'entraver l'accès aux services essentiels tels que les soins de santé.
Bien que le nombre de cas suspects de choléra ait diminué dans l'ensemble du pays, des épidémies localisées sont encore enregistrées. Par conséquent, le ministère de la Santé publique et de la Population (MSPP), en collaboration avec l'OPS/OMS, continue de maintenir une surveillance proactive et réactive afin de prévenir toute propagation potentielle de la maladie, en particulier dans les sites de personnes déplacées à l'intérieur du pays.
Les conditions de vie surpeuplées dans les sites de personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays posent des risques de propagation de la maladie. Selon l'Organisation internationale pour les Migrations (OIM), la récente flambée de violence a entraîné le déplacement de 20 000 personnes supplémentaires.
Personnes déplacées à l'intérieur du pays : Plus de 700 000 personnes, dont plus de la moitié sont des enfants, sont aujourd'hui déplacées à l'intérieur du pays. Certains sites de personnes déplacées sont confrontés à des problèmes critiques d'accès à l'eau et aux latrines et à des conditions de morbidité croissantes (fièvre, malnutrition, diarrhée, toux, violences sexuelles).
Au 11 novembre 2024, près de 53 000 personnes déplacées étaient encore hébergées dans les 41 sites soutenus par la Direction de la Santé du département de l'Ouest (DSO) avec la collaboration de l'OPS/OMS. Ce nombre représente environ 25 % de l'ensemble des personnes déplacées réparties sur 91 sites dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince.
Ports d'entrée: L'aéroport international reste fermé et le port national de Port-au-Prince reste difficile d'accès car les zones environnantes sont sous le contrôle des gangs.
Carburant : les perturbations de l'approvisionnement en carburant dues à la violence des gangs ont retardé les livraisons de camions citernes au terminal principal, laissant certaines stations-service sans carburant et entravant les opérations.
Situation du choléra
Après plus de 3 ans sans cas, le 1er octobre 2022, les autorités nationales haïtiennes ont rapporté deux cas confirmés de choléra dans l'agglomération de Port-au-Prince. Au 26 octobre 2024 (dernier rapport officiel), le MSPP a rapporté 87 616 cas suspects, 4 858 cas confirmés, 85 071 cas hospitalisés, 1005 décès institutionnels et 314 décès communautaires.
Les derniers mois ont vu une réduction constante du nombre de cas de choléra signalés, mais des flambées localisées sont surveillées dans la commune de Dessalines (Artibonite) et à Cité Soleil (Ouest). L'OPS travaille avec le MSPP et d'autres partenaires (MSF) pour renforcer l'équipe locale de réponse au choléra et pour fournir des médicaments essentiels et des fournitures pour le traitement, malgré la situation sécuritaire qui entrave sérieusement la réponse, en particulier à Cité Soleil.
Les facteurs de risque de propagation du choléra restent présents et sont renforcés par la crise, car l'approvisionnement en eau pourrait se raréfier et les conditions sanitaires se détériorer, ce qui pourrait entraîner une résurgence de nouveaux cas de choléra. Un soutien continu à la surveillance, à la détection précoce et à la réponse rapide sont des conditions essentielles pour maintenir le contrôle de l'épidémie et briser la chaîne de transmission de manière durable.
Réponse de l'OPS/OMS
Réponse de l'OPS/OMS
En réponse à l'escalade de l'insécurité et de la crise humanitaire en Haïti, l'Organisation panaméricaine de la Santé (OPS) a soutenu le Ministère de la Santé (MSPP) et les partenaires actifs dans le domaine de la santé afin d'atténuer la pression actuelle sur le secteur de la santé causée par la violence prolongée des gangs et de protéger la capacité opérationnelle des établissements de santé essentiels pour continuer à fournir des services de santé d'urgence aux populations locales.
"Le soutien de l'OPS/OMS au MSPP a permis d'effectuer près de 20 000 consultations médicales et de fournir plus de 38 tonnes de fournitures médicales provenant de son stock au Panama pour soigner les personnes déplacées à l'intérieur du pays."
Cette opération a été rendue possible grâce à une collaboration avec le PAM, le Dépôt humanitaire des Nations unies (UNHRD) et le soutien financier de la Commission européenne pour l'aide humanitaire (ECHO). Ces fournitures ont été stratégiquement prépositionnées dans les centres de santé des départements du Centre, du Nord-Est, du Nord, de l'Artibonite et du Nord-Ouest en tant que stock de contingence.
L'OPS/OMS distribue des médicaments et des fournitures médicales aux principaux établissements de santé par l'intermédiaire de l'entrepôt PROMESS et veille au maintien de la chaîne du froid, essentielle à la conservation des vaccins. Dans le cadre de ces efforts, l'OPS/OMS a récemment fait don d'équipements médicaux à l'Hôpital Universitaire de la Paix, lui permettant de traiter jusqu'à 3 000 blessés graves et de continuer à fournir des soins aux populations vulnérables, y compris les femmes enceintes et les personnes déplacées à l'intérieur de la zone métropolitaine de Port-au-Prince.
Principales activités de réponse :
Donation de médicaments, de fournitures médicales et d'équipements aux établissements de santé qui restent opérationnels dans la capitale.
Livraison de produits sanguins et de consommables au Centre National de Transfusion Sanguine pour la reprise des activités de tests sanguins.
Distribution de produits d'hygiène et d'assainissement à 53 000 personnes déplacées dans 41 sites de la région métropolitaine de Port-au-Prince.
Soutien aux autorités locales pour la mise en place d'activités de surveillance et la fourniture de services de santé (cliniques mobiles) sur les sites des personnes déplacées.
Fourniture de carburant au Centre ambulancier national pour assurer la continuité des opérations ambulancières dans la zone du PaP.
Renforcement du soutien à la surveillance épidémiologique et de laboratoire au niveau national et départemental pour le choléra et d'autres maladies à tendance épidémique
Soutien psychosocial aux personnes vivant dans des abris et confrontées à la stigmatisation et à la peur d'épidémies telles que le choléra.
Soutien aux personnes déplacées à l'intérieur du pays
L'OPS/OMS a soutenu les efforts de réponse des autorités sanitaires haïtiennes et d'autres partenaires de la santé pour détecter et répondre aux besoins sanitaires aigus des populations déplacées dans 41 camps de la zone métropolitaine de Port-au-Prince accueillant plus de 53 000 personnes.
Les activités comprenaient le soutien à la prestation de soins par la distribution de médicaments et de fournitures médicales et la mobilisation des travailleurs de la santé, la surveillance épidémiologique, la vaccination et le soutien psychologique, entre autres. Ces actions ont été menées avec le soutien financier généreux du Bureau d'aide humanitaire (BHA) de l'USAID, d'Affaires mondiales Canada (GAC) et du Fonds central d'intervention pour les urgences humanitaires (CERF).
Besoins urgents et demande de financement
Les besoins financiers de l'OPS/OMS pour répondre aux besoins urgents de santé publique de la population haïtienne s'élèvent à 24,5 millions de dollars pour 2024. Au 1er novembre 2024, l'organisation a mobilisé 8,526,359 millions de dollars en contributions volontaires pour soutenir des interventions sanitaires ciblées et des efforts de réponse aux urgences sanitaires à travers le pays. Le déficit de financement critique de 15,973,641de dollars entrave considérablement la capacité des partenaires de santé à fournir des services de santé essentiels et vitaux aux Haïtiens les plus vulnérables.
Les besoins critiques en matière de santé sont les suivants :
Acheter des fournitures pour les transfusions sanguines, de l'oxygène, des médicaments essentiels et des équipements médicaux nécessaires aux hôpitaux et aux autres partenaires de la santé pour soutenir la fourniture de soins d'urgence ;
Assurer l'accès à la nourriture, au transport et aux récompenses financières pour le personnel de santé restant ;
Fournir un soutien technique, opérationnel et logistique à l'HUP et aux autres établissements de santé opérationnels (carburant, réparations mineures, générateurs, plan d'urgence pour les blessés), afin de les maintenir opérationnels ;
Soutenir le Centre ambulancier national afin d'augmenter le transfert des patients et des blessés (carburant, pièces détachées, fournitures médicales).
Prépositionner et étendre les opérations de logistique et de chaîne d'approvisionnement en République dominicaine pour une mobilisation rapide des fournitures vers Haïti jusqu'à l'ouverture du corridor humanitaire.